Esprit Créatif
Les esprits créatifs survivent toujours aux mauvais traitements...

Bienheureux les fêlés, car ils accélèrent quand tout le monde freine

Les parts de marché sont plus faciles à prendre quand tout le monde freine. C'est donc aujourd'hui, et non demain, qu'il faut innover, conseille le spécialiste Brice Auckenthaler.

C'est dans le "crunch" qu'il faut mordre à pleines dents

Non, ce n'est pas une page de pub pour un chocolat qui croustille. Ici, le ''crunch'', c'est le trou d'air que l'avion planétaire est en train de traverser. La Communauté européenne a déclaré 2009 année de l'innovation. Et pourtant, avec la crise financière, la défiance déploie ses rets pervers. Le moral des entreprises, de leurs collaborateurs et des ménages français part en vrille ? C'est maintenant qu'il faut se souvenir de la jolie antienne d'Antoine Riboud : ''Il n'y a pas de fatalité dans le business''.

Remobiliser les équipes

Faut-il stopper toutes affaires cessantes les projets d'innovations Airbus 350 ou de Fret GV (associant la SNCF et la Poste), le lancement de Grazia en presse, ou freiner le nouveau produit financier Cachemire de la Banque Postale ? Geler les investissements de la voiture zéro émission promise pour 2012 ? Réfrigérer les budgets R&D de L'Oréal, Danone, Nestlé ou Unilever ? Ne plus inciter les départements Ressources Humaines à motiver les collaborateurs sur le thème de l'innovation ? Arrêter d'inventer de nouveaux concepts de distribution HQE ? Ne plus avoir l'ambition de changer les règles des marchés comme tentent de le faire Apple, Google, la MAAF ou Dyson ? Oublier le web 3.0 et les process collaboratifs ? Ne plus oser mettre au point l'Europe de l'Innovation ? Ne plus aider les PME dynamiques à se lancer à la conquête de la planète avec de beaux projets verts ? Ou bien, au contraire, en profiter pour accélérer et remobiliser sur cet enjeu clé qu'est la qualité d'initiatives des équipes ?

C'est plus facile quand tout le monde freine

Plutôt que de vous crisper sur vos freins, repensez à l'idéogramme chinois qui signifie à la fois crise & opportunités. Chefs d'entreprise et managers, n'attendez donc pas 2010 et des lendemains réenchantés pour lancer vos équipes à l'assaut de nouveaux défis excitants qui leur donneront le sentiment de mieux maîtriser leur avenir et de renforcer la fierté d'appartenance à une entreprise pas comme les autres. Les parts de marché sont plus faciles à prendre quand tout le monde freine, c'est bien connu.

Le moral dans les chaussettes ? C'est le moment d'accélérer!

En ce moment, dans cet entre-deux un peu mou, tout se passe comme si, pour les Français, il y avait un " blanc " entre aujourd'hui et demain. Il y a là comme une croyance magique que l'on peut tenter d'expliquer et qui n'est pas fatale : la difficulté des entreprises et des marques à saisir des opportunités ou à dépasser leurs freins s'explique rarement par leurs marchés; les marchés ne sont qu'un miroir de la vision et de la volonté des équipes dirigeantes. Vont s'affronter alors deux temporalités : celle du court terme et celle du long terme. Cette dernière étant traditionnellement assimilée à l'innovation, car il faut soi-disant du temps pour innover et, surtout, que tout aille bien. Renault a réussi, a contrario, à raccourcir les délais de fabrication d'un véhicule avec la Logan, et ce malgré un contexte économique morose. Starbucks incite ses collaborateurs à profiter de la crise pour réinventer l'entreprise. Et, d'après un sondage effectué par Business Week (édition du 20 avril 2009), 58% des managers des 100 entreprises les plus innovantes déclarent vouloir augmenter leurs investissements en innovation en 2009/2010.

Bienvenu à la réinitialisation de l'innovation

L'innovation n'est pas concevable dans un contexte de peur et de repli. Et si, demain, les gagnants étaient ceux qui parviendront le mieux à innover en mobilisant les volontés et en coordonnant les savoirs, les intelligences, les imaginations de façon collective et sereine ?

Après le salarié ''coût de production'', profitons ainsi de la crise pour passer au salarié ''producteur d'initiatives''. Ce sera la source de leur fidélité, la source d'énergie qui permettra de traverser les épreuves. Après l'innovation à tous les étages de l'entreprise, comme chez Solvay ou Thales, voici peut être venu aussi le temps où les portes de l'entreprise doivent s'ouvrir pour convier les clients dans la cuisine de la conception de nouvelles initiatives dont ils seront les utilisateurs... et les ambassadeurs.

La " valeur justifiée " plutôt que la " valeur ajoutée "

Et ce, au moment où :
  1. Une saine remise en question va s'opérer, amenant à réfléchir à de nouvelles opportunités
  2. Le centre de gravité de l'innovation se décale d'Ouest en Est
  3. Les pays occidentaux sont tentés par un légitime repli nationaliste, 4/ internet 2.0 est en train de naître,
  4. Au moment où, enfin, les préoccupations liées au développement durable sortent des limbes, il y a ici un véritable enjeu pour la France et ses entreprises au sein de l'Europe : être exemplaires en matière de dynamique.Et retrouver le chemin de la création de " valeur justifiée ".
Il est grand temps de réinventer l'innovation pour redonner du ressort à l'envie d'innover. Vous conviendrez avec nous que " ralliez-vous à mon innovation et inventons ensemble "' a plus de panache que " il faut obtenir à nos actionnaires un R.O.I de 19%' ". C'est ainsi que la confiance repartira de plus belle.

Quatre mots clés

Transmission : transmettre l'ADN de votre marque en interne et en externe pour contribuer à l'avènement de nouvelles initiatives cohérentes ;

Appropriation : dans un contexte plus difficile, ce sera la condition clé du succès des innovations, en interne et auprès des différents publics externes ;

Pérennité : l'innovation est un processus engageant qui s'auto-génère. Une fois la machine à idées lancée, difficile de l'arrêter...

Pilotage fin : l'innovation en temps de crise nécessite une équipe rapprochée de pilotes animateurs enthousiastes. Et de surcroît coureurs de marathons, car l'innovation est une longue course faite d'une succession de 100 m haies ponctuée de 'non', 'pas possible', 'faut voir... peut être quand on aura le temps et l'argent'... Le pouvoir ne vient plus d'en haut, mais du coeur d'un réseau d'innovateurs convaincus.

Et vive les "félés"
" Si le pessimisme est d'humeur, l'optimisme est de volonté ", dixit le philosophe Alain, et le réalisme est affaire d'opportunisme. En temps de crise, bienvenue par conséquent aux fêlés innovateurs optimistes. Comme aimait le dire Michel Audiard : " ... Il faut des fêlés car on voit la lumière au travers...".

Auteur : Brice Auckenthaler
Source : Les Echos

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Fabrice Copywriter

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